Une interview de Saint-Malo 2022…

Depuis le festival « Qui des Bulles » à Saint-Malo, Shelton nous entraîne dans l’histoire familiale du scénariste et dessinateur Macelino Truong. Pour cette première partie d’interview, l’auteur de « 40 hommes et 12 fusils », paru chez Denoel Graphic, nous ramène dans l’Indochine de son père…

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Et encore des séries…

J’avais promis de revenir prolonger l’évocation des séries romanesques et me revoici donc avec pour commencer un personnage singulier, Antoine Marcas !

Antoine Marcas est un policier qui est aussi (ce n’est pas incompatible du tout) franc-maçon. Le personnage a été créé par Giacometti et Ravenne (ce dernier, Jacques Ravenne, est d’ailleurs réellement franc-maçon, maître au rite français et donc l’aspect lié à la franc-maçonnerie n’est pas traité avec légèreté) en 2005 avec le roman « Le rituel de l’ombre ». Depuis les romans se sont enchainés avec quelques points communs : ce sont des thrillers avec une base policière et contemporaine, un lien avec l’histoire officielle ou secrète, une écriture rythmée et parfois crue, un grand nombre de personnages et un final très spectaculaire (en cinéma on dirait avec effets spéciaux sans limites !)…

Je viens de lire « Marcas », opus de 2021 qui vient de sortir en version poche. Un vol et un crime dans un établissement franc-maçon de Paris, Le Grand-Orient, deux policiers qui mènent l’enquête, La commandante Alice Grier pour la crim’ et le commandant Antoine Marcas en conseiller « franc-maçonnerie » et, surtout, de très longues et excellentes séquences dans un château sur les bords de la Dordogne, du Moyen-âge à nos jours…

Là encore, même si certains lecteurs exigeants (et ils ont bien raison de l’être !) pourront objecter sans difficulté que l’écriture est quand même assez basique, que les fils de l’intrigue sont souvent cousus de fil blanc, que les liens avec l’histoire sont à peine supérieurs à ceux du Da Vinci Code… (et j’entends bien tout cela !), je dois avouer que d’une part, c’est à chaque fois des intrigues très bien construites, un fond historique et franc-maçon étayé, des relations humaines approfondies et solides (que ce soit Marcas avec ses proches, y compris son fils, ou avec ses collègues d’enquête) et que le tout donne un roman solide à chaque fois même si on a le droit de préférer tel roman ou tel autre, comme dans toute série. Ce titre « Marcas » m’a donc bien plu et le lien avec la présidence de la République Française m’a bien amusé… surtout le final, mais je n’en dis pas plus !

Je voudrais évoquer maintenant une série atypique, « Loveday et Ryder » de Faith Martin. Pourquoi atypique ? Elle ressemble à deux gouttes d’eau à ces romans du genre Cosy Mystery mais il ne faudrait pas se laisser abuser par les apparences…

Oui, les enquêteurs pourraient bien être comme dans ces romans, des dilettantes : une jeune femme, Trudy Loveday, dans la police dans les années soixante et donc strictement « utilisée » à des tâches administratives (en aucun cas enquêtrice sur le terrain) et Clément Ryder, ancien chirurgien devenu coroner (lui aussi très éloigné des enquêtes sur le terrain) qui se retrouveraient, parfois et dans certaines circonstances exceptionnelles, à enquêter sur des affaires mystérieuses… Mais si ce premier aspect peut faire illusion, il est temps de prévenir le lecteur qu’ici, pas d’humour, pas de légèreté, pas de comédie et seulement des affaires très noires, très glauques et des personnages somme toute assez sombres : Loveday est clairement mal traitée sur son lieu de travail et Ryder est un ancien chirurgien chassé de son travail par une maladie qui le ronge… Ne rêvez pas non plus, pas d’histoire d’amour entre ces deux personnages, plutôt l’histoire d’une transmission humaine profonde qui est très belle…

Dans ce roman, « Couronnement fatal à Middle Fenton », sixième roman de la série traduit en langue française, tout commence avec un meurtre horrible et un suicide d’aveu… L’affaire est cruelle et sanglante et le suicidé et le fis d’un ponte de la police locale… Pourtant, il faudra bien faire la lumière sur cette affaire et ce ne sera pas si simple… La jeune femme policière et le vieux coroner arriveront-ils à aider la lumière à descendre sur la scène de crime ? On a envie de dire oui au premier abord mais, allez savoir, ce n’est pas si évident…

Quand Dracula est revisité par Mickey…

Avec leur série consacrée aux héros de Disney revus et corrigés par les auteurs de la BD franco-belge mais en respectant le cahier des charges disneyen, reconnaissons que tout est possible y compris de rencontrer Mickey confronté à Dracula !

Mais au-delà des impressions de lecteur à chaque nouvel album, ce qui touche à la subjectivité totale, absolue et légitime de chacun, je dois avouer que j’ai une préférence indiscutable pour certains personnages (Donald, Picsou, Daisy et leurs proches) tandis que je peine un peu à trouver du plaisir avec Mickey et mes siens. Certes, j’apprécie l’idée de retrouver le comte Dracula au château de Beetsylvanie pour la signature d’un contrat juteux… mais je préfère indiscutablement le roman original de Bram Stoker !

En fait, je crois que cela viens de certaines lectures de jeunesse période durant laquelle je lisais avec plaisir les exemplaires du Journal de Mickey chez le coiffeur… Enfin, soyons très honnêtes, je lisais Le journal de Mickey seulement s’il n’y avait pas de Rodéo ou Ivanhoé que je n’avais pas lus ! Et dans le Journal de Mickey, je lisais en premier Donald, Picsou, Zorro et Pim Pam Poum… Donc, mes préférences remontent à très loin…

Pour autant, j’avoue que la narration graphique de Bruno Enna (scénariste) et Fabio Celoni (dessinateur) est de qualité et que j’ai apprécié lire cette histoire jusqu’au bout. J’avoue que j’avais envie d’écrire « mais il m’a manqué le petit grain de folie d’un Donald… » en fait, il y a quand même le docteur Dingo Van Helsing qui est bien allumé…

Cet album permet la revisite d’un roman que les lecteurs adolescents ou plus devraient se faire un plaisir d’aller relire dans sa version classique… N’hésitez surtout pas !

Transdanses 2022, Chalon-sur-Saône : Une nuit entière…

Tatiana Julien, danseuse et chorégraphe, nous parle de son spectacle qui va avoir lieu les 15 et 16 novembre 2022 durant le festival Transdanses !

« Ce spectacle, Une nuit entière, que j’ai coécrit avec Anna Gaiotti et que nous interprétons ensemble, est né d’une rencontre, d’une envie de se faire rencontrer deux univers très opposé mais aussi par certains aspects très similaires. Toutes les deux, on a beaucoup de points communs, une sensibilité assez forte, on est à fleur de peau… Cette rencontre a eu lieu en studio et a été préparée par correspondance. On avait envie de créer ensemble mais au départ on ne savait pas quoi… Ce spectacle fut d’abord un fantasme de l’esprit à l’écrit et il répond, de fait, à nos premières intentions…

Le travail a été d’abord une aventure de corps à corps quotidienne, dans des temps très longs ouverts aux ressentis, les yeux fermés… Une peau contre une autre, un poids sur un autre, un corps qui s‘abandonne ou un corps qui s’active, un corps qui est enveloppé ou qui est trainé… Toutes ces dimensions vont soulever ou dégager des imaginaires chez les spectatrices ou les spectateurs, chez nous aussi… Un corps mort, un corps qui se réanime ou que l’autre réanime… Un squelette… Tout va teindre et tendre à une dramaturgie… Cette création s’est entièrement faite hyper sensiblement… Tout est parti d’improvisations très longues, puis petit à petit une forme est apparue, ça s’est distillé. On a retenu les éléments qui nous ont plus… Une dramaturgie est apparue et on a pu creuser dedans…

Tout est parti d’un travail du corps ! »

A la vie ! Un spectacle à voir…

Le spectacle vivant sert-il à quelque chose ? Même si la question est très déstabilisante pour les pratiquants, ceux qui fréquentent régulièrement les salles de spectacles, reconnaissons qu’elle a le mérite de nous obliger à répondre précisément… Le spectacle est une fabrique d’émotions, une machine d’humanisation, une source de réflexion, une boîte à « bonheur »… Le spectacle offre l’expérience, source intarissable qui abreuve notre cœur, notre cerveau, notre corps… Hier, à l’Espace des arts, il y avait la pièce de théâtre « A la vie ! » et tout ce que je viens d’écrire s’est amplement vérifié…

Une pièce de théâtre sur la vie, la mort, la fin de vie, l’accompagnement, le passage, la souffrance face à la mort, la souffrance physique, morale, mentale et métaphysique…

Dit comme cela, vous pourriez croire que les spectateurs étaient une poignée de masochistes en mal de souffrance et à la recherche de tortures supplémentaires… Comme si la nature humaine ne nous suffisait pas pour engendrer le désespoir ! En fait, il s’agissait d’un moment plein, entier, profond, alternant la gravité et la légèreté, le drame et la comédie, le gag et la réflexion philosophique… Un très bon spectacle !

De plus, la pièce fut suivie d’un temps de partage avec les membres de la compagnie Babel… Et le public est resté de façon significative à ce partage. Il faut dire que la question de la fin de vie n’est ni une question médicale, ni un débat juridique, c’est une question vitale, intime, qui concerne chacun d’entre nous et qui ne peut pas être traitée de façon uniforme…

Le spectacle ne donne pas de réponse universelle, mais cette soirée éclaire chacun pour que le moment venu des choix puissent être faits avec un maximum d’éclairages, de réflexion, de partage… Et ce n’est pas simple !

Merci à l’Espace des arts de participer au débat autour de ces grandes questions sociétales et à nous citoyens de nous en emparer pour ne pas laisser les « autres » décider pour nous !

[Photos fournies par l'Espace des arts, Christophe Raynaud de Lage]

Le spectacle vivant est capital dans nos vies… ou pas !

Depuis quelques mois, depuis que nous sortons progressivement de cette période pandémique qui a secoué fortement nos habitudes, les organisateurs d’évènements, de spectacles et de festivals s’interrogent avec parfois effroi sur la question qui pour eux est existentielle : comment faire revenir le public vers ces évènements qu’il a indiscutablement délaissés ?

Souvent, ces personnes qui cherchent désespérément la solution à leur angoisse professionnelle, constatent que le public s’est bien refermé sur lui, s’est globalement recentré sur ce qu’il croyait essentiel, a oublié la vie sociale… Du coup, chacun se demande ce qui est essentiel dans nos vies, ce qui est indispensable, ce qui est vital…

Si l’envie de trouver une solution chez les philosophes pointait le bout de son nez chez nous, je conseillerais volontiers d’aller faire une promenade livresque chez l’ami Blaise Pascal… Mais attention, il ne faudra pas se contenter de quelques lignes…

Tout d’abord, Pascal est capital, précis et autoritaire : nous ne devons pas nous laisser distraire ! Alors, certains affirmeront qu’il est donc essentiel de stopper les distractions de tous genres, les spectacles, les festivals, la télévision, la lecture… Se recentrer sur soi serait une bonne chose et le covid aurait au moins provoqué cela à défaut d’autre chose…

Seulement, Pascal va plus loin et il constate que nous pouvons nous laisser distraire par nous-mêmes. Se replier sur soi n’est pas une position de refus du divertissement, c’est plutôt une illusion, nous sommes abusés et distraits par nous-mêmes, par nos sens, nos ressentis… Ce n’est pas loin d’un orgueil, une vanité… Comme si nous étions le centre du monde !

Alors, comment ne pas se laisser distraire tout en intégrant l’humanité, en la convoquant à nos côtés pour éclairer nos choix, nos vies, nos destinés ? C’est là que le spectacle vivant peut retrouver du sens et qu’il peut apparaitre aux uns ou aux autres essentiel, vital, indispensable…

L’artiste est une sorte d’éponge qui intègre le monde, la vie, le vécu des uns et des autres. Dans le spectacle, il le restitue d’une façon ou d’une autre provoquant chez le spectateur l’interrogation, mécanisme parfois accompagné de rires et de pleurs, de sentiments de toutes natures qui permettent d’intégrer profondément les éléments apportés à la réflexion humaine…

Certes, tous les spectacles ne règlent pas toutes les questions existentielles de l’être humain mais depuis les antiques dramaturges, reconnaissons que presque tout a été dit et pensé. Chaque période, chaque culture, chaque artiste se permet juste de traduire, retranscrire, reformuler les éléments de réflexion pour un public qui évolue et prend là ce dont il a besoin… Il n’est plus dans une distraction futile, il est profondément dans un enrichissement humain durable et solide… Il n’est plus refermé sur lui, il est ouvert aux autres, à l’humanité toute entière !

Alors, le spectacle vivant n’est plus une activité humaine secondaire mais bien un moment de qualité ou chacune et chacun peut venir s’alimenter. Il n’est pas question non plus de vouloir à tout prix classer les spectacles en supérieurs ou inférieurs car devant chaque expérience, chaque performance, chaque situation, chaque temps fort artistique… chacun de nous pourra trouver de quoi progresser, évoluer… Et il en faut pour tout le monde sans que ce soit péjoratif ! Il ne faut rien sous-estimer, rien survaloriser, tout le spectacle vivant dans sa globalité est essentiel, à chacun de trouver ce qui est vital pour lui !

Aussi, quand un établissement culturel comme l’Espace des arts de Chalon-sur-Saône, scène nationale de qualité, présente sa prochaine saison, il s’agit bien d’un moment essentiel qui va permettre à chacun de trouver ce qui pourra lui faire du bien en humanité… La musique, la danse, le théâtre, les marionnettes, le cirque, la lecture… Tout peut conduire au beau, tout peut accompagner notre vie, tout est porteur d’humanité…

Alors, à chacun de saisir sa chance !

[La présentation de la saison a lieu vendredi 24 juin, la soirée est gratuite mais il faut réserver à l’Espace des arts]

[La tarification permet au plus grand nombre d’en profiter, y compris le jeune public avec un dispositif spécifique]

[La photographie est de Laurent Philippe]

Festival d’Angoulême 2022, neuvième partie du reportage…

Après avoir si bien commencé mon vendredi au festival d’Angoulême, j’ai continué mes rencontres avec enthousiasme et un moral remonté à fond. Seule ombre au tableau, avouons-le, je savais qu’après la dernière interview, il me faudrait prendre la route pour Chalon-sur-Saône soit environ six heures de route ce qui n’est pas rien après une journée complète de travail… Mais avant tout cela, il fallait déjà rencontrer Boulet et Aseyn et partir pour cet univers particulier de Bolchoï Arena… Cette série, déjà trois albums de parus, est très difficile à classer, cerner, présenter… Ce qui est certain c’est que la toile de fond est un tableau de ce que pourrait devenir Internet, une illustration de ce Metavers dont on parle souvent mais que peu cherchent à définir précisément. De quoi parle-t-on ? D’un Internet qui serait complété et renforcé par un mélange de réalité augmentée, de réalité virtuelle, de persistance, d’interactions possibles sans limites ou presque… Un peu comme si d’autres vies étaient possibles dans Internet (ou dans le Bolchoï Arena si vous préférez…)… Un peu, aussi, comme si les sciences pouvaient avancer plus vite ou différemment que dans la réalité, comme si les enjeux de pouvoir et d’argent trouvaient dans le Bolchoï leur aboutissement ultime… Bref, comme si la vie dans cet univers y était plus importante que dans la vie réelle !

Maintenant, ce n’est là que la toile de fond car dès que l’on rentre dans l’histoire, on est dans une histoire profondément humaine avec des personnages qui tentent de vivre leur vie avec des relations « normales », vous savez amitié, amour, confiance, trahison, solitude, pouvoir, tension, compétition… Rien de bien nouveau sur cette Terre… Enfin, à part que l’on n’est pas non plus réellement sur Terre et que l’univers du Bolchoï change un grand nombre de rapports humains…

C’est passionnant, très bien construit par le scénariste Boulet qui s’est très bien documenté sur le sujet et qui offre au lecteur des perspectives, des réflexions, des informations… Le dessin et surtout le jeu des couleurs mis en place par Aseyn sont totalement adaptés à l’histoire et le lecteur est plongé dans le Bolchoï de façon si efficace que dès la quatrième ou cinquième page du premier album on devient, nous aussi, une sorte d’acteur de cet univers !

Anecdote en passant, Boulet était assez dubitatif devant le grand nombre de professionnels et festivaliers qui avaient abandonné le masque (comme le gouvernement l’avait autorisé) et il s’avère que finalement il avait bien raison puisque le festival d’Angoulême fut une sorte de cluster avec un coronavirus qui fut bien partagé… Mais c’est une autre histoire !

Dès cette interview terminée, je quitte le stand Delcourt pour rejoindre l’hôtel Mercure ou m’attend un collègue, Cédric, qui va réaliser ses premières interviews d’auteurs durant ce festival. Ensemble, nous retrouvons Georges Bess et son épouse… Nous allons pouvoir aborder le travail admirable qu’il a réalisé sur deux romans gothiques anglais du XIX° siècle, Dracula et Frankenstein !

Georges Bess, qui a déjà 75 ans, est pour beaucoup d’entre nous un grand de la bande dessinée et nous avons chacun, dans sa production, notre petit préféré. Moi, c’est indiscutablement la série Juan Solo tandis que Cédric reste attaché à la série Le lama blanc. Mais je l’avoue, depuis que j’ai ouvert Dracula, ces deux derniers albums, adaptation très fidèles, sincères, personnelles, graphiques et réussies, ont un peu pris la première place…

L’échange est comme un moment hors du temps qui se déroule sur un rythme paisible, profond… Je ne sais pas si j’aurai encore l’occasion d’interviewer Georges Bess mais j’en profite pleinement près de 25 ans après notre première rencontre… Ce sera l’un des temps forts plein d’émotion de ce festival et ce sera à revivre dans le kiosque à BD sur RCF en Bourgogne très bientôt…

Après ce moment collector, si je puis me permettre, nous prenons le temps avec Cédric de nous sustenter quelque peu car l’après-midi sera encore bien rempli…

Festival Angoulême 2022, huitième partie du reportage de Shelton…

Et nous voici arrivés au dernier jour de mon festival d’Angoulême 2022. Oui, cette année, suite à différents problèmes organisationnels et de santé, je ne suis pas resté les samedi et dimanche. Donc, le vendredi avec ses douze rencontres programmées allait clôturer mon séjour dans la Charente…

Mais, avant de me précipiter vers la salle de presse pour y rencontrer mes premiers invités, je décide de prendre le temps pour aller voir de près la façade décorée par Catel en hommage à René Goscinny. Il faut dire que cette année le scénariste Goscinny, disparu en 1977, aura été bien à l’honneur : une exposition de qualité au musée de la ville d’Angoulême et une inauguration officielle de cette façade… Après tout, l’heure des scénaristes est sur le point d’arriver… Qui sait ?

Une autre petite anecdote sur cette façade. Elle est située rue Goscinny. Je n’avais pas regardé à l’avance l’emplacement sur la carte et je pensais que des habitants de la ville m’indiqueraient facilement la direction… On peut toujours rêver ! En effet, la rue Goscinny ne semble pas très connue et j’ai mis du temps à la trouver. Heureusement, c’est l’un des membres du bureau de l’association qui organise le festival qui finira par me mettre dans la bonne direction… Et, surprise, cette rue est exactement dans le prolongement de la rue Hergé…

Je peux alors me mettre en route pour l’hôtel de ville où se situe la salle de presse… Avant, je rappelle à tous ceux qui ne l’auraient pas encore lu qu’il existe un très beau livre sur Goscinny (et sa fille)… bien sûr, vous l’aurez deviné, un roman graphique de Catel elle-même !

Ce matin-là, je vais avoir trois duos d’auteurs à la suite et ce sera tout d’abord Rodolphe-Griffo. On peut dire deux grands de la bande dessinée sans enlever quoi que ce soit aux autres auteurs reçus ce festival. Les deux septuagénaires se retrouvent sur un projet né d’un rêve de la femme de Griffo que ce dernier a repris et organisé avant de faire appel à Rodolphe pour le transformer en véritable scénario… Un beau travail collectif, basé sur la confiance et l’amitié. La bande dessinée, un one shot, Iruène, est à la fois réaliste mais fortement imbibée de mysticisme, de réincarnation, de volonté de sa faire pardonner, de salut de l’âme… C’est aussi un hommage au peuple primitif d’une île sur laquelle vit Griffo… Une île des Canaries… La Palma… Alex vit de nos jours mais il va pouvoir revenir dans le passé et corriger sa propre histoire, celle de son peuple… Le voilà redevenu Bencomo chef de son peuple Guanche… Mais, pourra-t-il réellement protéger son peuple et son île face aux Conquistadors ?

En tous cas, l’interview se déroule très sereinement dans cette grande salle de presse encore calme… Mais, une fois cette première rencontre terminée, il me faut pénétrer dans l’antre populaire et bruyante car la prochaine a lieu sur le stand Delcourt où m’attendent, ou presque, Serge Lehman et Frederik Peeters… D’ailleurs, finalement, c’est quand même plus calme que ce que je pensais initialement ce qui tente à prouver qu’effectivement la fréquentation du festival 2022 sera inférieure à celles des autres années… On parlera dans le bilan de -25%… Et ce fut peut-être bien pire que cela !

Nous voici donc autour de cette série atypique dont deux tomes sont déjà parus, Saint-Elme. Cette série est à la fois policière, financière, familiale, délocalisée et surprenante, hantée de personnages tous plus fous les uns que les autres (« Mais jamais déprimés ! » précise immédiatement Frederik Peeters). Je pense qu’il faut l’ouvrir sans idées préconçues, juste avec l’envie de se laisser surprendre par l’histoire, par son traitement graphique, par ses couleurs…

Alors, bien sûr, comme il y aura au total cinq albums dans la série, il est difficile de tout vous raconter ou de raconter sans casser le suspense… Donc, il vous restera surtout à écouter l’interview lors de sa diffusion sur RCF en Bourgogne puis de vous précipiter sur ces albums et d’en profiter car je l’avoue j’ai adoré et j’attends la suite avec beaucoup d’impatience…

Ayant sous la mais ces deux auteurs, j’en profite pour parler rapidement d’Oleg (avec Frederik Peeters) et de la suite donnée à La brigade chimérique (Serge Lehman)… Après tout, il est bien normal de rentabiliser son temps, ses déplacements et d’être à fond durant 30 minutes !!!

Par contre, nous n’en étions qu’au début de cette grande journée de festival…

(A suivre !)

Festival Angoulême 2022, septième partie du reportage de Shelton…

Bien, le temps passe et je réalise que je ne vous ai pas encore raconté tout mon festival d’Angoulême. Certes, ce n’est pas vital mais cela peut quand même donner des idées de lecture… Alors, reprenons où nous en étions, je quittais l’hôtel Mercure pour rejoindre le Champ de Mars et le stand des éditions Delcourt où j’avais rendez-vous avec Giorgia Casetti.

Quand on rencontre pour la première fois une autrice, on doit s’attendre à tout pour ne pas être surpris. Dans mon cas, puisque je fais de la radio, les problèmes majeurs sont soit un voix qui passe mal, soit un manque total de répartie, soit des auteurs qui ne parlent que par « oui » ou « non » sans jamais développer… et, n’oublions pas non plus les auteurs d’origine étrangère qui parlent peu, mal ou pas du tout le français ! Certes, on peut passer par une langue commune, mais le résultat est quand même rarement très radiophonique…

Quand je découvre Giorgia Casetti, j’avais tout cela en tête mais très vite je souffle intérieurement : elle parle très bien le français, elle est vive et je sens que tout va très bien se passer. On peut donc entrer dans le vif du sujet, c’est-à-dire l’album « Abby & Walton » qu’elle a dessiné sur un scénario d’Anaïs Halard…

Il s’agit d’un conte pour la jeunesse mais le traitement, le sujet, la qualité de la narration graphique… en font un album grand public qui peut être lu à tous les âges ou presque. Plusieurs thèmes d’ailleurs sont abordés dont d’une certaine façon la mort, les enfers, les relations entre les personnes et, aussi ou surtout, les relations entre une mère et sa fille jeune adolescente… Attention, il ne s’agit pas d’une bande dessinée d’horreur dont l’objectif serait de faire peur… Bon, le lecteur peut avoir un petit peu peur, mais pas trop car même avec la Mort, il y a un peu d’humour…

Giorgia est jeune, très dynamique, parle avec clarté, explique ses choix, ses démarches, ses goûts et ses envies… Son dessin est marqué par le manga, par Disney et elle travaille dans la bédé franco-belge. Le mélange est de qualité, la narration graphique est pertinente et agréable à lire… Et l’entretien dont je viens de réécouter quelques passages est fluide et passionnant !  Après l’entretien, je vais apprendre qu’elle était très tendu au départ car elle n’avait pas l’habitude des interviews et que cette expérience lui a fait du bien car elle s’est rendu compte qu’un entretien avec un journaliste n’est quand même pas la mer à boire !

Avant de rencontrer l’autrice suivante et dernière de la journée, Mademoiselle Caroline, je discute avec quelques auteurs, journalistes et attachées de presse dans la salle Delcourt. Un petit coucou amical à Davy Mourier que je ne vais pas interviewer cette année à Angoulême mais qui est un ami que j’apprécie rencontrer dans les festivals même quand je ne lui tends pas le micro… En plus, il est en train de « chasser » le Pokémon ce qui fait bien rire, avouons-le, tous ses amis…

Si je découvrais Giorgia, j’avoue qu’avec Mademoiselle Caroline, il s’agit plutôt de retrouvailles après quelques années sans se croiser, du moins dans la vie réelle car je suis non seulement ses ouvrages parus mais aussi ses dessins et autres mots sur les réseaux sociaux !

Ce fut donc une belle rencontre avec la possibilité d’aborder des ouvrages différents. En effet, il y a ceux dans lesquels Mademoiselle Caroline se met au service d’une cause (La différence invisible, Le journal de Célia), ceux où elle raconte un épisode de sa vie (par exemple Ma vie d’artiste) et ceux où l’on retrouve ses dessins de blog ou de réseaux sociaux (Carnet d’aventures ordinaires).

Ce fut donc une très belle façon de terminer la journée, une belle tranche de festival de la bande dessinée… et surtout une belle fatigue qui va me permettre de m’écrouler sur mon lit jusqu’au lendemain matin…