Quand nous étions orphelins de Kazuo Ishiguro
( When we were orphans)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

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Enfance et trahison
Vous connaissez "Les Vestiges du jour", ce magnifique film adapté par James Ivory d'après le roman de Kazuo Ishiguro ? Du même auteur, voilà un beau roman, intelligent, complexe, qu'on peut lire à plusieurs niveaux.
Pour moi, une de ses clés essentielles est dévoilée par le héros dans cette phrase : "(Mon enfance) n'a rien d'une terre étrangère pour moi. A maints égards, c'est là que j'ai continué de vivre toute ma vie. C'est seulement maintenant que j'ai commencé mon voyage pour m'en éloigner." Cette phrase, elle est dite presque à la fin du livre. Nous sommes en 1937. Christopher Banks, un célèbre détective, tente depuis bien longtemps de retrouver ses parents, disparus à Shangaï alors qu'il était un tout jeune garçon. C'est la quête de toute sa vie, c'est sa manière à lui de lutter contre le mal qui ne cesse de gagner le monde, et il doit reconnaître à ce moment-là qu'il ne peut réussir dans cette quête fondamentale. Je ne peux pas vous raconter la fin, bien que le roman se présente comme une fausse enquête. La toile de fond historique (l'approche de la deuxième guerre mondiale, l'invasion de la Chine par les Japonais, les luttes entre les Chinois nationalistes de Tchang-kaï-chek et les Chinois communistes) peut aussi masquer ce qui, à mon sens, est le cœur du livre : l'enfance, l'amour de nos parents, les compromissions des adultes, leurs lâchetés, leurs trahisons. D'ailleurs, tout le livre ne cesse de fonctionner en flash-backs. C'est à la fois sa force et sa complexité ! Christopher va vivre une épreuve physique et morale à la fois grandiose et absurde pour essayer d'atteindre enfin ses parents : c'est au bout de cette épreuve qu'il mesurera pleinement le manque creusé en lui par leur disparition. "Quand nous étions orphelins"... Nous, c'est Christopher bien sûr, mais c'est aussi Sarah Hemmings, une jeune femme idéaliste et passionnée, qui recherche inlassablement le beau, le grand, le vrai; c'est aussi Jennifer, la fillette que Christopher a adoptée, et qu'il n'hésite pas à quitter pour partir à la recherche de ses propres parents; c'est aussi Akira, le jeune Japonais ami d'enfance de Christopher : il avait toujours ses parents certes, mais le Japon lui manquait. Tous ces personnages en manque sont récapitulés dans cette dernière page : "Notre destin, à nous et à nos semblables, est d'affronter le monde comme les orphelins que nous sommes, pourchassant au fil de longues années les ombres de parents évanouis. A cela, il n'est d'autre remède qu'essayer de mener nos missions à leur fin, du mieux que nous le pouvons, car aussi longtemps que nous n'y sommes pas parvenus, la quiétude nous est refusée." A nous, lecteurs d'Ishiguro, la nostalgie ne sera pas refusée.
Les éditions
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Quand nous étions orphelins [Texte imprimé], roman Kazuo Ishiguro trad. de l'anglais par François Rosso
de Ishiguro, Kazuo Rosso, François (Traducteur)
Calmann-Lévy
ISBN : 9782702132166 ; 2,98 € ; 21/08/2001 ; 384 p. ; Relié -
Quand nous étions orphelins [Texte imprimé] Kazuo Ishiguro traduit de l'anglais par François Rosso
de Ishiguro, Kazuo Rosso, François (Traducteur)
Gallimard / Collection Folio
ISBN : 9782070359462 ; 9,20 € ; 05/11/2009 ; 512 p. ; Poche
Les livres liés
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Une histoire qui commence bien

Critique de Odile93 (Epinay sur Seine, Inscrite le 20 décembre 2004, 70 ans) - 17 octobre 2021
Pas franchement un policier ni un thriller bien que Christopher le personnage principal soit un détective anglais très renommé.
Deux éléments mystérieux suscitent ma curiosité, d'abord la recherche de ses parents portés disparus à Shanghai et ensuite la rencontre avec l'énigmatique Sarah qui fréquente assidûment les salons et cocktails de la haute société.
C'est au moment de fuir Shanghai pour Macao que le livre bascule dans le burlesque, tellement le déroulement de l'histoire devient totalement abracadabrantesque, oui du grand cinéma, rien de plus !
Je n'accroche plus du tout. Ainsi le dialogue de Christopher avec le capitaine, sa rencontre incroyable avec son ami d'enfance, le destin de sa mère (absolument impossible dans la réalité), tout cela fait une histoire à laquelle on ne peut croire.
Un bon début mais le dénouement très décevant
Entre Londres et Shangai

Critique de Romur (Viroflay, Inscrit le 9 février 2008, 51 ans) - 21 février 2018
Un roman plein de finesse et de subtilité sur le paradis perdu de l’enfance, sur la mémoire et ses pièges, sur l’amitié et l’amour, servi par la langue riche et les descriptions de Kazuo Ishiguro. Il nous plonge en particulier dans l’atmosphère de Shanghai à diverses époques, l’évocation du champ de bataille étant particulièrement terrible
Un roman qui est toutefois pour moi un ton en dessous des autres Ishiguro que j’ai pu lire. Un peu trop improbable, pas totalement crédible.
Un londonien en Chine

Critique de ARL (Montréal, Inscrit le 6 septembre 2014, 39 ans) - 24 octobre 2017
La plume d'Ishiguro est toujours on ne peut plus britannique, toute en retenue. Les personnages sont flegmatiques, presque froids. Les émotions sont réprimées, même lors des moments les plus tragiques. Certains lecteurs trouveront peut-être cette distance agaçante, surtout s'il s'agit de leur première rencontre avec l'auteur. Néanmoins, le récit prend rapidement une tournure captivante, au fur et à mesure que l'oignon s'épluche et que les couches successives révèlent toute la tristesse de la vérité. Ishiguro construit son récit à sa manière, loin des archétypes du genre policier; lentement, par fragments, sans que l'on puisse tout saisir. "Quand nous étions orphelins" n'est sans doute pas son roman le plus percutant, mais il s'agit sans contredit d'une œuvre d'art à part entière.
De Shanghai à l'Angleterre : mou

Critique de Elya (Savoie, Inscrite le 22 février 2009, 35 ans) - 30 décembre 2012
Le récit est cependant bien moins mystérieux et de fait moins captivant. Il retrace l’enfance puis l’âge adulte d’un natif de Shanghai expatrié en Angleterre suite à la mort de ses parents à l’âge de 8 ans. Il devient alors enquêteur privé, et sa vie se résumera à ses enquêtes dans sa vie professionnelle comme personnelle. Ses relations avec les femmes, souvent ambiguës, nous sont relatées, ainsi que ses souvenirs d’une enfance heureuse et typique faite de jeux, d’amitié et d’affection envers sa mère.
Arrivée au 1/3 du roman, on s’est déjà endormis. Le sujet change alors un peu, et on pourrait penser que si l’histoire avait démarré ainsi, elle aurait peut-être plus emballé.
Un Japonais anglais

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 1 février 2007
Et de fait, ce Kazuo Ishiguro m’est apparu dans cette oeuvre comme le croisement d’un John Irving avec un André Malraux. La virtuosité d’un Irving pour monter, agencer et raconter ses histoires et le souffle épique d’un Malraux.
Peut-être Malraux s’est-il imposé à mon esprit de par le passage du roman en Chine pendant la guerre qui évoque irrésistiblement « La Condition Humaine ». Même confusion et incertitude de ce qui se joue là, de qui tue qui ou veut gagner quoi.
Orphelin, Christopher Banks l’est depuis qu’il a été évacué de Chine vers l’Angleterre, enfant, alors que ses parents avaient disparu.
Jennifer aussi l’est, la jeune fille adoptée par Christopher adulte, juste au moment où celui-ci, devenu détective réputé, décide de repartir en Chine plus de vingt ans après pour découvrir ce qui s’est passé …
Histoire d’enfance, d'amitiés d’enfance, d’aventures d’enfance, qui trouvent un terrible écho l’âge adulte venu. Car le retour de Christopher Banks en Chine pour mener sa quête de toujours, la recherche de ce que sont devenus ses parents est terrible. L’aventure est alors guerrière. Guerrière et en Chine et quand on se remémore ce que Malraux a pu raconter dans « la Condition Humaine », c’est tout simplement effrayant.
« Parmi les ruines, nous découvrions sans cesse du sang répandu – parfois tout frais, parfois desséché depuis plusieurs semaines -, sur le sol, sur les murs, sur les restes de meubles fracassés. Pire encore – et nos narines nous en avertissaient bien avant nos yeux -, nous tombions avec une régularité déconcertante sur des amas d’intestins humains à divers stades de décomposition. A un moment où nous reprenions haleine, j’en fis la remarque à Akira et il me répondit simplement :
« Baïonnettes. Soldats plantent toujours baïonnette dans le ventre. Si on l’enfonce ici (il montrait son thorax), baïonnette ne ressort pas. Alors soldats apprennent. Toujours le ventre. » »
L’histoire est poignante, le talent de l’écrivain impressionnant. Aussi à l’aise pour évoquer le monde de l’enfance d’un Christopher Banks, enfant de colons anglais en Chine que celui de l’enfer de la guerre et de ses dommages collatéraux au niveau des individus.
On dévore « Quand nous étions orphelins » plus qu’on ne le lit !
Quand nous étions orphelins

Critique de Allegra (Huy, Inscrite le 4 décembre 2006, 53 ans) - 17 janvier 2007
Je n'en dirai pas plus pour ne pas dévoiler la fin du livre. Mais, vu le bien que l'on dit de cet auteur, je m'attendais à mieux.
L'enfance et les racines

Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 22 novembre 2001
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